l'Abbé Grégoire. Une « tête de fer » en Révolution.
Contribution La Griffe Île de france
Rubrique Ad Hoc
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Rapport avec le rite:▲▲▲
Incontestablement les grands événements historiques sont un test de personnalité : ils révèlent le courage, la lâcheté, la détermination ou la compromission. L'Abbé Grégoire s'inscrit dans l'honnêteté, quoi qu'il lui en coûte. Il devient ainsi une figure tutélaire pour un Maçon : pas de détours, mais une ligne droite qui le conduira d'un obscur village d'une Lorraine encore indépendante jusqu'au Panthéon. Il nous pose aussi directement la question de l'impératif moral kantien : l'éthique qu'elle soit religieuse ou philosophique n'est pas négociable avec la compromission. Ainsi, l'Abbé Grégoire prendra fait et cause pour le statut des Juifs et le combat sans relâche contre l'esclavage, malgré une très nette hostilité des révolutionnaires se réclamant de la liberté, de l'égalité et de la fraternité, mais vivants très largement du trafic d'esclaves, faisant de Bordeaux, Calais et la Rochelle des villes prospères reposant sur la traite ! La peur de la concurrence pour les commerçants va déclencher aussi une vague d'antisémitisme qui va, naturellement, à l'encontre des idéaux révolutionnaires. Grégoire, prêtre devenu Évêque constitutionnel de Blois, pensant que son christianisme est compatible avec les idéaux de la Révolution Française, se tiendra debout, telle la statue du Commandeur et condamnant les dérives qui se déroulent à partir de 1792 : massacres dans les prisons, exécution du Roi, guerre de Vendée, Terreur. Sans concession, il se tirera de cette période par l'arrivée au pouvoir de Napoléon avec lequel il se fâchera d'ailleurs lorsque l'Empereur restaurera l'esclavage !
Au-delà des options politico-religieuses de l'Abbé Grégoire, ce dernier s'adresse à nous : La Franc-Maçonnerie est d'abord le vécu d'une éthique, (d'une foi, pourrions-nous dire), qui est confrontée au réel de la vie profane dès que nous clôturons nos tenues. C'est là où se pose la question de la négociation entre le réel fluctuant au gré de l'actualité et nos convictions éthiques. Qu'elle est en fait notre marge de manœuvre ? La vie de Grégoire souligne également la différence que l'on peut opérer entre la morale et l'éthique : la morale est individuelle et relève de ses convictions et l'éthique est collective. Cela nous conduit à un discernement essentiel : qu'est ce qui relève de ma morale propre et qu'est ce qui relève de l'éthique communautaire ? Avec, comme la tolérance l'exige, de ne pas faire de ma morale personnelle une éthique collective !