Ils ont choisi la solitude

Contribution La Griffe Île de France

Rubrique Ad Hoc

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Intérêt de lecture ▲▲▲▲▲

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Rapport avec le rite ▲▲▲

« La récente crise sanitaire a souligné combien nous sommes inégaux quant à notre capacité à vivre la solitude. Et elle a suscité un regain d’intérêt pour les solitaires au long cours » J-C Noyé. Quelle impression de souffle et de délivrance ! Cette très sérieuse étude, historiquement passionnante, nous fait rêver à la tentation que nous avons tous à un moment donné de notre vie : laisser tout tomber pour aller vers l'essentiel, se retrouver après s'être beaucoup perdu dans l'inutilité de choses sans importance, le fameux « Métro-Dodo-Boulot » des années 68 ! Les taoïstes chinois appellent cela le « Wou Wei », le lâcher prise. On l'associe évidemment à la nature et, projetant notre imaginaire sur des images, se voir, tel Alexandra David Neel méditer dans une grotte himalayenne ou en plein désert saharien comme le Père de Foucault. Heureusement, nous sommes reconduits par l'auteur au principe de réalité : dans la vie citadine, bruyante et anarchique, nous pouvons vivre l'érémitisme plus facilement que dans les solitudes. Sous réserve, bien entendu, que nous choisissions cette option et que notre solitude et notre silence ne soient pas les conséquences d'un isolement social : un grand nombre de personnes âgées ne choisissent nullement le statut d'ermites, mais y sont condamnées. Cette voie particulière ne peut être que très minoritaire, car elle demande une organisation psychologique spécifique qui peut, si elle n'est pas en adéquation, conduire au pire en réveillant des névroses et psychoses latentes.

Ce monde de l'érémitisme, ce « hors-cadre » s'est toujours confronté dans l'histoire avec celui d'un monde conventuel où le groupe serait la condition sine qua non de parvenir à la spiritualité. En tant que Maçons, cette opposition nous intéresse : dans nos rencontres nous travaillons et réfléchissons en groupe (« Ora et Labora ») ; nous aurions donc un fonctionnement « conventuel », mais nos rituels nous incitent aussi à rechercher l'isolement d'un silence intérieur, donc d'une certaine pratique se rapprochant de l'érémitisme. Bernard de Clairvaux disait « Heureuse Solitude, seule béatitude ! » Peut-être que la Maçonnerie, dans son fonctionnement, a trouvé le tempo idéal entre vie de groupe, qui est déjà une sorte de prière commune, et temps provisoire de retrait du groupe, comme une sorte de retour nécessaire au désert pour tenter de vivre la dimension intime avec un Principe.

 

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