L'Intranquille, Autoportrait d'un fils, d'un peintre, d'un fou.
Contribution La Griffe Île de France
Rubrique Coups de coeur
L'autobiographie de Gérard Garouste: une existence tourmentée qui trouve son terme dans une sorte d'apaisement méditatif.
Intérêt général de l’ouvrage: ▲▲▲▲▲
Recommandation de lecture: ▲▲▲▲
Facilité de lecture: ▲▲▲▲
Rapport avec le rite: ▲▲
Bravo au Centre Pompidou pour cette rétrospective qui permet de saisir toute la richesse du parcours de l’« Intranquille », comme il se nomme lui-même. Lire cette autobiographie est presque la récompense, le retour au calme, après avoir affronté, dans l'exposition, le tsunami d'une œuvre que l'on reçoit comme une claque, une révélation brutale de notre propre inconscient face à une réflexion qui, à la faveur (si j'ose dire !) de la maladie mentale, nous révèle nos failles, notre goût du néant et nos masques sociaux qui ne sont que des distorsions de notre nature profonde. Cet « agité » se caractérise aussi, dans son œuvre par une formidable culture, une curiosité sans borne dans la recherche d'une dimension qui transcenderait une nature humaine pas très brillante. Dante, Cervantès, Kafka, les personnages mythologiques ou bibliques viennent dialoguer avec nous, nous happent, quand nous sommes plongés dans la fascination de l'œuvre de Garouste. Mais, chez l'artiste, nous lisons aussi une recherche éperdue du père. Ce dernier est d'ailleurs un personnage douteux qui durant la guerre vivra en vendant les meubles confisqués aux juifs et abandonnera rapidement sa famille, obligeant son fils à vivre en Bourgogne, récupéré par son oncle et sa tante. Chaque rencontre fortuite avec ce père fera l'objet d'une agressivité sans borne, qui se traduit dans de nombreux de ses travaux. Comment échapper à la folie dans ce contexte ? En peignant, dans les périodes où la psychose lui en laisse le loisir. En fait, il met en place, tant bien que mal sa règle du « Je ». Et puis, dans sa quête permanente du père, il va rencontrer le judaïsme et en travailler les textes avec Marc Alain Ouaknin pour finalement s'y convertir, dépassant ainsi sa problématique sur l'opposition traditionnelle entre Apollon et Dionysos qui avait inspiré une grande partie de son œuvre auparavant. Se définissant comme un « passeur », il va créer, en 1991, « La Source », une association d'éducation et de formation dans l'art, pour les enfants défavorisés. Pour nous, Gérard Garouste est l'image iconique de la résilience. Bravo l'artiste !