LA BANLIEUE DE PARIS
Contribution La Griffe Lorraine
Rubrique Coups de cœur.
Désenchantement ou innocence attendrissante ?
Intérêt général de l’ouvrage: ▲▲▲▲
Recommandation de lecture: ▲▲▲▲
Facilité de lecture: ▲▲▲▲▲
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Cinquante-cinq pages de texte libre sur la banlieue parisienne qu’arpente Cendrars et plus particulièrement le chemin de ceinture ou les anciennes fortifications, au temps des bistros auquel succèdera bientôt celui des pompes à essence. Ce texte écrit à saint Segond. (Villefranche) en juillet-aout 49 est suivi d’une centaine de photos en noir et blanc de Doisneau, prises, elles, en 47-49.
Merci mon Dieu, les photos ne sont pas légendées !!! Texte et photos sont comme les rives d’un grand fleuve, se répondent en laissant à l’un et l’autre leur liberté. Douceurs/comme puanteurs.
Le texte est plus noir que les photos car la banlieue est « un décor d’ogre », de chasse aux rats, de ratonnades réunissant pour un temps les bandes rivales (« tous contre les sidis ») et de radeuses édentées... « Un monde fadé, sonné, qui a son compte, un monde truqué » … mais pas sans humanité, ni petite nostalgie ; Un exemple ? Celui du douanier Rousseau, du côté de Vanves, qui venait, en visite à son octroi, manger des escargots au lendemain d’une grosse pluie, buvant un vin blanc gommé. Cendrars et Doisneau n’ont jamais déambulé ensemble, mais correspondu et chacun, au final, fait part de son « assombrissement » sur ce monde à part. Désenchantement ou innocence attendrissante ? Non, la vérité de la misère est si présente, qu’elle soit derrière l’anecdote ou l’ennui d’une vie … vide, « ni véritablement ciel ou enfer, mais le monde des hommes, terre à terre ». ;
A travers la banlieue, ses spécificités, ses migrations, Cendrars parle des jardins ouvriers méticuleusement entretenus, des congés du mois d’août, de l’herbe qui borde les guinguettes, des trains, des vélos, des routes où picorent les volailles, des chats rhumatisants, des terrains d’équarrissage, des giclures de goudron, de la couleur zinzolin, des connins du Bourget, des bistros, des bistros, des bistros … Dans des phrases interminables, qui sont autant d’inventaire, mais drôles, fines, chargée de poésie mais aussi d’un sentiment de révolte, anar, devant cette fraternité fracassée des hommes.
Un vin blanc gommé : avec du sirop ou de la limonade ? Merci la Griffe.