JOURS DE TRAVAIL Les journaux des raisins de la colère
Contribution La Griffe Lorraine
Rubrique Coups de coeur
C’est le plus long journal que j’ai jamais tenu.
Recommandation de lecture:▲▲▲▲
Intérêt général de l’ouvrage ▲▲▲△△
Facilité de lecture ▲▲▲▲▲△△△
Rapport avec le rite ▲△△△△
John Steinbeck écrivit en 1938, « les raisins de la colère » en sept mois d’un travail harassant.
Et tint, pour la première fois, parallèlement, un journal…non pas un journal … « mais une tentative de cartographier les journées et les heures effectives d’un roman ». Il s’agit donc moins de ce qui s’est passé (visites, taches diverses, relations amicales ou professionnelles) que ce qu’il faut faire advenir au roman en cours ; (aujourd’hui arrivée dans le camp, demain : description des allures, des vêtements, la manière de louer et charger la voiture de la famille Joad ...)
La lucidité de Steinbeck est sidérante (une journée de travail se mesure à deux mille mots).
Tout est ordonné, la vision claire. Il faut simplement travailler comme une brute. Fatigue, dépression, besoin de solitude (et non de servitude), d’écarter les emmerdeurs, la radio et la presse (car Steinbeck avait déjà écrit « en un combat douteux » et « des souris et des hommes ».
Bref garder assez de forces pour, peine perdue, apprivoiser le temps présent, la vie, le corps et le corps du roman. Les deux se calquent ou s’opposent. Temps instantané de « jours de travail » et temps dévasté des « raisins de la colère ». Une barrière dressée car, et c’est l’auteur qui l’écrit, « le travail en tant que tel ne sera jamais la réponse qui convient ». Paradoxe ?
Colère puis impassibilité. Il faut savoir aussi attendre « plus j’attends, et plus le livre s’écrit ». Vous l’avez compris, cher écrivain-lecteur en herbe de la Griffe : « Jours de travail » est un ancrage (encrage) du temps dans l’élaboration du roman. Puis le roman lève l’encre pour, par un travail fou, servitude volontaire mais vaine, faire surgir dans l’esprit du lecteur, lui faire lire les mots qui ne sont pas sur la page.
La qualité majeure de cette cartographie est de le faire sentir…