PINOCCHIO
Contribution La Griffe Midi Pyrénées
Rubrique Coups de cœur.
Il ne suffit pas d’être en mouvement pour avoir une âme !
Intérêt général de l’ouvrage: ▲▲▲▲
Recommandation de lecture: ▲▲▲▲
Facilité de lecture: ▲▲
Rapport avec le rite:▲▲
L’auteur, Giorgio Agamben, philosophe italien, évoque dans cet essai savant certaines des interprétations, fréquemment fantaisistes, qui ont accompagné, dès sa publication en 1882, le Pinocchio de Giorgio COLLODI. Pinocchio est depuis lors souvent revisité, notamment par des auteurs en mal d’ésotérisme et chrétiens ou Francs-Maçons ne sont pas en reste. Peut-être pas sans raisons.
Qui est la Fée-fillette qui manœuvre Pinocchio ? Héritière des Parques, elle tire les ficelles virtuelles du pantin, ses cheveux bleus ne pourraient-ils témoigner d’une origine « au-delà du céleste ».
Morceau de bois ou petit-garçon ? Refusant la réalité des hommes, la marionnette fait moultes bêtises à un rythme soutenu : il ne suffit donc pas d’être animé pour avoir une âme !
Si son nez s’allonge « matérialisant » le mensonge, c’est aussi par cet appendice qu’on se fait mener !
Notre philosophe s’interroge : qui tire les ficelles ? Depuis PLATON nous savons que l’homme, pantin merveilleux fabriqué par les dieux, est relié par les fils de ses passions à une entité qui le dépasse.
Pinocchio est une métaphore de la condition humaine. Toutefois, la marionnette, au contraire des hommes, ne connaît pas l’affect. Si les humains ont perdu leur innocence paradisiaque, peuvent-ils retourner à l’état d’innocence (de grâce) en mangeant à nouveau le fruit de l’arbre défendu ? Ce serait nous dit AGAMBEN, le dernier chapitre de l’histoire de l’humanité… Pinocchio, pour sa part, refuse d’aller à l’école, conservant de fait sa grâce… Le pantin ne veut pas devenir un être pensant, n’est-il pas, d’ailleurs, changé en âne ? Notre philosophe reprend, sans le citer le pari de l’absurdité de CAMUS : devenant humain, Pinocchio aurait conscience du monde et n’en ferait donc plus partie qu’en opposition à la Création puisque doué de raison !
Cette fable induit nombre de plans de lecture, depuis le regard sur l’enfance jusqu’à celui plus critique sur la société. La tentation est grande de faire feu de tout bois ! Mais Giorgio AGAMBEN m’a donné l’occasion et l’envie de mieux lire le Pinocchio de Collodi et m’a doté de clés pour le faire.