Les heures heureuses.
Contribution La Griffe Île de France
Rubrique AdHoc
Ce qu'il en est du « Kairos » dans le destin de l'homme.
Recommandationde lecture: ▲▲▲▲▲
Intérêt général de l’ouvrage ▲▲▲▲▲
Facilité de lecture ▲▲▲▲
Rapport avec le rite ▲▲▲
Il faut avouer que l'on se laisse prendre à chaque fois, avec délice, aux pièges de celui qui ne va pas tarder à voir, sans doute, son œuvre colossale publiée à la Pléiade ! Cette fois, il se lance dans le tome XII d'une réflexion globale qu'il intitule « Le dernier royaume » et qui nous parle des « heures heureuses », même si elles n'en prennent pas toujours l'aspect caricatural de ce que l'on nomme le bonheur. Il convient de donner une forme imprévisible à sa propre vie et s'y tenir quelle qu'elle soit devenue. Cette forme d'ascétisme consiste à accueillir le hasard, l'inconnu et d'en discerner ce qui serait bon pour nous et qui s'inscrit dans notre destin. Á l'intérieur de l'énigme de chaque vie, chacun devient alors l'indice d'une chance qui est comme tombée du ciel. Notre destin ne serait pas pensé, mais serait à l'écoute du « bon moment » à saisir pour nous, cette « bonne affaire » n'étant un clin d'œil du destin qu'exclusivement adressé à nous, à notre propre passé, à l'image de la mer. Quignard écrit (page 49) : « Le passé revient sans cesse sous la forme d'étranges vagues qui ne sont jamais semblables. Qui douchent et trempent. Elles peuvent jeter à terre. Le passé de nos vies et, au fond du vivant, le passé de la nature, sur la terre, assaillent ». De toute façon le bonheur ne vient pas à son heure mais il double soudain l'âme qui le ressent. Il prend de vitesse toute vitesse. Il prend par surprise, naturellement. C'est ainsi que la nature passe avant les hommes et qu'elle est peut-être la plus belle forme du temps, plus profonde que la langue et plus vaste que l'être. En fait, le passé est instable et on ne sait jamais ce qu'il réserve à l'avenir. On ne sait rien de ce qui nous attend au fond du monde depuis le fond du monde. Le temps ignore ce que la durée inhomogène de la nuit a emmagasiné au fond de l'origine. Il convient alors de saisir dans cette éternité un bout de destin qui nous concerne.
Ce livre est un Kairos !