Contribution La Griffe Midi Pyrénées

Rubrique Art

Que deviennent les vers sous l’effet de de la vie ?

Recommandation de lecture ▲▲▲

Intérêt général de l’ouvrage ▲▲▲

Facilité de lecture ▲▲▲▲

Rapport avec le rite ▲

En 1963, Sylvia Plath, l’épouse américaine du grand poète anglais Ted Hughes, un an après leur séparation qui a suivi la liaison de son mari avec une jeune femme, met, à 31 ans, sa tête dans le four de la cuisinière et périt par le gaz. Cette fin d’une tragédie féroce, qui ponctue la précipitation avec laquelle Sylvia Plath a écrit ses derniers poèmes, Ariel, empreints de la détresse d’un quotidien foudroyé par ses vers, l’ancre pour l’éternité au Panthéon des grands poètes de l’humanité. 1994. L’essayiste et journaliste américaine Janet Malcolm s’empare du mythe de ce couple de poètes et dans un long récit méticuleux, en explore les diverses et divergentes hypothèses. Son livre « La femme silencieuse » est enfin traduit aujourd’hui en français. L’auteure, en bonne journaliste, se livre à une longue enquête d’investigations sur les circonstances de la vie du couple qui ont abouti à ce drame. Elle en interroge tous les témoins... De quoi m’expliquer, enfin, l’émotion que j’ai ressentie à la lecture d’Ariel ! La démarche de Janet Malcolm remet en cause la crédibilité de bien des biographies qui ne sont jamais exemptes de subjectivité voire, comme ce fut le cas pour celles de Sylvia Plath, de parti-pris, de préjugés. Il a été facile pour le public de prendre faits et causes contre Ted Hughes. Mais la vérité prise dans les emportements de l’histoire est multiple et contradictoire. L’amour apparaît en creux tout au long de l’enquête, un amour fou qui emporte tout sur son passage, conforme au désir d’Absolu de la poète et la souffrance sauvage qui ronge Sylvia Plath au départ de Ted Hughes, le chaos qui en résulte, la libèrent des pesanteurs dont elle ignorait qu’elles l’entravaient dans sa création. Ce qui dicte son génie poétique, qui éclate comme un feu d’artifices dans les poèmes d’Ariel, c’est son état fébrile qui l’empêche de manger et de dormir, en proie à une jalousie dévorante et à un lamentable auto-apitoiement. Sylvia Plath accomplit alors la cruelle mission de tout poète qui se doit de révéler à tous ce que tout un chacun conserverait dans le secret de son cœur. Et la réussite est stupéfiante !

Ce livre confirme que le bon poème, le seul authentique, naît de son impérieuse nécessité. Cette nécessité va stupéfier Sylvia Plath « la femme silencieuse » qui croyait ne devoir écrire « que le cœur en paix ».

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