François Mitterrand
Contribution La Griffe Lorraine
Rubrique Coups de coeur
Intérêt général de l’ouvrage: ▲▲▲▲
Recommandation de lecture: ▲▲▲▲
Facilité de lecture: ▲▲▲▲▲
Rapport avec le rite: ▲
Prince de l'ambiguïté, honni ou adulé, François Mitterrand a fasciné beaucoup plus par sa personnalité insaisissable que par ses idées et son action politique. Maître de l'équivoque, adepte du secret, patient, habile et n’ayant jamais été découragé par l'échec, il a incontestablement marqué la vie politique française. Figure originale d'un monarque de gauche bercé par le régime parlementaire, son expérience au sein de la « République de l’éloquence » lui a fait comprendre que le pouvoir se conquiert grâce à la formation de coalitions dans les couloirs de l'Assemblée nationale. Peu importe ses convictions, l'essentiel pour lui était d'avoir le pouvoir, ce qui peut expliquer la conversion aux idées de gauche de cet homme initialement de droite, ou encore le soin qu’il a porté à renforcer notre Constitution après avoir écrit Le coup d'État permanent en 1964. Homme de culture et de tradition en plein cœur de la modernité, François Mitterrand incarne cette dualité qui trouve son paroxysme dans la remise de sa décoration de l’ordre de la francisque précédant son entrée dans la Résistance. Sa ténacité, sa volonté d'indépendance et sa force dans l'adversité sont également contrebalancées par une personnalité manipulatrice, des amitiés sulfureuses et des qualités de stratège mises au service de son maintien au pouvoir à tout prix.
En cette période particulière marquée par le retour du parlementarisme, cet ouvrage nous offre une plongée dans l'histoire de la Gauche, à travers ses fondements, ses divisions, ses rassemblements et ses crises. Elle nous permet de mieux comprendre la situation actuelle du Parti Socialiste, où comment un courant socialiste révolutionnaire est devenu un parti socialiste, puis social-démocrate, avant d’être social-libéral.
Malgré une certaine partialité, le style et le sens de la synthèse de Michel Winock contribuent à la réussite de cet ouvrage, qui retrace le cheminement insaisissable d'un socialiste converti, d'un romantique politique, d'un président qui avait une ambition culturelle pour la France et qui n’hésita pas à dire « Je suis le dernier des grands Présidents. Après moi, il n’y aura plus que des financiers et des comptables ». Mettant en lumière la vie d’un homme comme un ensemble de contradictions au sein d’une seule et même cohérence, cet ouvrage est d’abord et avant tout une invitation à la réflexion.