342 HEURES DANS LES GRANDES JORASSES
Contribution La Griffe Lorraine
Rubrique Hors-Normes
Intérêt général de l’ouvrage ▲▲△△△
Facilité de lecture ▲▲▲▲▲
Rapport avec le rite ▲▲▲△△
Un récit hors du commun, pour une mésaventure hors du commun. Les récits de haute montagne relatent le plus souvent des victoires sur des sommets difficiles ou par des voies des plus ardues. Or, dans ce récit autobiographique, René Desmaisons nous livre les péripéties d'une cordée tragique qui le conduiront lui et un compagnon, à surmonter, in extremis, les pires conditions.
C'est ce que l'on nomme une hivernale. Les deux hommes se donnèrent pour objectif d'atteindre le sommet des Grandes Jorasses, la pointe Walker (4208 m), par une voie directe. Inutile de vous préciser que ce genre d'ascension n'est réservé qu'à une élite. A trois cents mètres du sommet, les éléments se déchainent : un froid glacial dans une tourmente de neige, et pire encore, des chutes de pierres qui détruisent le matériel d'escalade. Impossible de poursuivre et impossible de descendre. Pris au piège, avec seulement deux jours de vivres, ils survivront jusqu'à ce qu’un hélicoptère piloté par un as les délivre deux semaines plus tard en se posant au sommet avec des sauveteurs. C'est tout et c'est immense.
Solitude, sentiment d'abandon, un espoir insensé anime pourtant les deux hommes jusqu'à ce que Serge Gousseault décède le onzième jour. Le récit est plein d'humanité tragique, il met en lumière ce que la force de l'esprit peut accomplir quand tout paraît perdu. La solidarité entre les deux grimpeurs, leurs essais, leurs tentatives impossibles, donnent à cette histoire vraie une tonalité puissante et surhumaine dans laquelle la faiblesse du corps est vaincue par une volonté sans faille. Hélas tout homme à ses limites et la mort du compagnon de René Desmaisons vient entacher la montagne d'un deuil terrible.
A l’époque, en 1971, le drame fit grand bruit. Les tentatives de délivrance par des cordées de secours s'avérèrent infructueuses jusqu'à l'arrivée de l’hélicoptère. Depuis le refuge du Requin, les hommes assistaient impuissants à cette épopée tragique. La presse, les radios, les télévisions s'en firent une sorte de feuilleton malsain, avec bien sûr les inévitables polémiques.
Le livre est simple, d'une écriture brute, sans emphase, sans gloriole, à l'image des parois verticales des Grandes Jorasses.